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Cliquez pour agrandir  Face à la crise, la C.S.S. ne reste pas inactive. La liquidation de la Société d’Extraction et de Transport de Sable, dont la C.S.S. est créancière, lui permet de récupérer une flotte de trente bateaux automoteurs. Pour les exploiter, elle crée une filiale appelée Services des Sablières de la Seine (S.S.S.) qui se spécialise dans le transport de sable de la région parisienne vers la région du Nord où la C.S.S. crée une agence commerciale.

   Cette activité sera rapidement rentable car les bateaux transportent du charbon à Paris en fret de retour. Etendant son champ d’activité, la C.S.S. fait l’acquisition de terrains sur la Basse-Seine, dans la région de Rouen et débute leur exploitation. Elle crée enfin sur son site de Draveil (photo ci-dessus), rue de Châtillon, une activité de fabrication de barges et de pontons, sous le nom d’Atelier de Draveil lequel emploiera jusqu’à une centaine d’ouvriers métallurgistes.

  En collaboration avec les sociétés Morillon-Corvol et SETM, la C.S.S. tente de mettre en place un accord de non-concurrence concernant l’ensemble des compagnies sablières de la vallée de la Seine en vue de contrôler le marché et d’éliminer les petits exploitants. Elles créent la F.I.S.P. (Fédération industrielle du sable de Paris) mais les accords conclus ne seront pas respectés par les sociétés de la Basse-Seine (région rouennaise où la C.S.S. tente de s’implanter) et seront dénoncés en 1936. Pour la première fois de son histoire en 1936, la Compagnie doit recourir à des emprunts bancaires, bien que Robert de Courcel accepte de différer la perception des redevances de fortage qui lui sont dues, pour améliorer la situation de trésorerie de la société.

Cliquez pour agrandir  Les travaux de la ligne Maginot (photo ci-contre) ne donnent guère de travail à la C.S.S. car les dépôts de la Compagnie se trouvent trop éloignés des chantiers de fortifications et le coût du transport est prohibitif. En revanche, les travaux de l’Exposition Universelle de Paris, en 1937, organisée sur le Champ de Mars, relancent le marché des matériaux. La Compagnie doit cependant déménager provisoirement son dépôt du quai de Javel, concerné par le site de l’Exposition. A l’issue de celle-ci, la démolition des pavillons permet des contrats avantageux : l’enlèvement des déblais qui servent à combler les sablières épuisées de Vigneux et de Grigny.

  Grâce à l’activité de ‘‘La Dalila’’ et de sa petite sœur ‘‘Antinéa’’, la fouille Laveissière à Draveil est en voie d’épuisement tandis que se développe l’exploitation de La Saussaie-des-Gobelins à Vigneux. En 1935, dans des conditions économiques difficiles, l’activité de la C.S.S. se déploie dans trois secteurs :
- l’extraction et la commercialisation de granulats. Elle gère dix ports le long des quais de la Seine, alimentés par péniches et auxquels les clients viennent s’approvisionner par camions : Pont de Courbevoie, Pont de Sèvres, Javel, Grenelle, Alma, Saint-Bernard, Quai de la Gare, Canal Saint-Martin, etc.
- l’exploitation d’une flotte fluviale d’une centaine de navires, pour livrer les ports ou les chantiers des clients et enlever les matériaux de démolition.
- l’entretien et la réparation des moyens de dragage, la conception de nouvelles machines dans son bureau d’études et ses ateliers de Vigneux. La construction navale dans ses ateliers de Draveil.

 Ses effectifs s’élèvent à près de mille personnes. Elle met en œuvre : huit dragues, huit grues, deux élévateurs, huit pontons, onze gros remorqueurs et deux petits, cent dix-sept bateaux de navigation fluviale, six bateaux-clapets et dix-huit bateaux-margottats, etc...

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2 - Les grèves de 1936 –1937

  L’évolution de la situation politique en France - la victoire du Front populaire et les accords Matignon - vont avoir des conséquences sur la vie de C.S.S., comme sur toute l’industrie française.
  Le 14 février 1936, le président informe les administrateurs que « les mariniers qu’emploie la Compagnie des Sablières de la Seine se sont mis en grève le 13 février sans motifs valables et sans préavis. Ils ont donc été considérés comme ayant rompu leur contrat de travail et comme démissionnaires. Les mariniers ont entraîné dans la grève les équipages des dragues. L’alimentation des ports de Paris continue d’être assurée par les chefs de service. A l’occasion de cette grève, une diminution des salaires et une réduction des effectifs sont prévues ».

   La grève est de relativement courte durée puisque, le 3 mars, le président fait savoir que « la grève du personnel de la Compagnie est virtuellement terminée. Les demandes de la clientèle ont été satisfaites pendant cette période, grâce à l’effort du directeur général, M. Boisseau, des chefs de service et des hommes de plus en plus nombreux, à assurer le travail. Malgré l’insistance de l’inspecteur du travail, représentant le ministre du Travail, aucune conversation n’a eu lieu avec le personnel démissionnaire. Les ouvriers qui se sont présentés ont été rembauchés un par un. Un certain nombre d’éléments nouveaux ont été recrutés, soit sur place, soit dans l’Est. L’embauche sera limitée aux stricts besoins du moment et l’effectif restera nettement inférieur, à activité égale, à ce qu’il était précédemment. Le conseil décide l’attribution d’un certain nombre de primes au personnel qui, pendant la durée de la grève, a assuré le service ». L’état d’esprit avait donc peu évolué depuis 1908.

Cliquez pour agrandir  Du fait de cette situation, le mouvement de grève générale déclenché après les élections législatives du 3 mai 1936 - ayant vu le succès du Front populaire - sera très peu suivi par les terrassiers et les mariniers mais, déclare le président le 5 juin, « la grève des ateliers est à craindre à très brève échéance, le personnel devant s’appuyer sur les revendications présentées dans l’ensemble de la métallurgie. Par contre, la marine et l’exploitation ne sont pas animées du même désir, mais la pression des municipalités les entraînera obligatoirement dans la grève générale . Le manque de commandes rend d’ailleurs cet arrêt du travail probable profitable à la Compagnie ».   Cependant, on constate, dès cette date, un changement notable de la position de la direction puisque « le conseil admet le principe de la signature d’un contrat collectif avec le personnel, en application des prochaines décisions gouvernementales ». C’est ce qui s’appelle ‘‘prendre le train en marche’’ ! En fait, l’adoption des lois sociales du Front populaire - la semaine de 40 heures, les deux semaines de congé payés, l’augmentation des salaires de 10 % - mettra fin rapidement aux grèves. La direction de la C.S.S. ne s’opposera pas à leur application puisque, s’appliquant à l’ensemble de l’industrie, elles mettaient toutes les entreprises sur le même plan.

  Cependant, un conflit très dur éclatera de nouveau l’année suivante au sujet de l’application de la loi sur les 40 heures. Il durera du 26 juin au 27 août 1937, essentiellement dans le milieu des terrassiers-dragueurs. En effet, les ouvriers réclamaient de faire la semaine de 40 heures en 5 journées de 8 heures, alors que la C.S.S. voulait maintenir les chantiers et ateliers en service 6 jours par semaine, grâce au travail par roulement. Fort du soutien du syndicat patronal des entreprises sablières – celles-ci l’aident à tenir ses engagements commerciaux en mettant des matériaux et des moyens de transport à sa disposition -, la C.S.S. tient bon.

Cliquez pour agrandir  Le président peut déclarer le 31 août : « La grève totale du service exploitation qui avait débuté le 26 juin 1937 a pris fin le 27 août. Partie seulement de l’ancien personnel de la Compagnie a pu être réembauché, le volume actuel des ventes ne permettant pas l’emploi d’un effectif égal à celui qu’employait la Compagnie au mois de juin. L’horaire de travail primitivement fixé par la direction a, bien entendu, été maintenu et sera dorénavant appliqué. A dater du 12 août, une production partielle a été assurée par une équipe composée de la direction, des chefs de service et agents de maîtrise. La rupture du contrat de travail par le personnel a entraîné la perte de ses droits aux congés payés. Le conseil décide que partie des sommes que la société n’aura pas à verser à ce titre sera employée au versement d’allocations aux familles d’ouvriers les plus nécessiteux, et partie sera remise à titre de gratification au personnel dont le dévouement et l’énergie ont permis la reprise du travail dans des conditions normales ». C’est donc avec un effectif réduit, adapté à la stagnation du marché du sable, que la Compagnie reprend ses activités jusqu’à la déclaration de guerre de 1939.

3 - L’avant-guerre

  L’année 1938 est marquée par le décès de Paul Piketty, premier président de la C.S.S. Pierre Piketty (fils de Paul) et Maurice Piketty (fils aîné de Charles) sont membres du conseil d’administration car, possédant environ vingt pour cent du capital, la famille Piketty joue un rôle actif dans l’administration et dans les choix stratégiques de la Compagnie. Cette dernière a d’ailleurs procédé en 1937 à une restructuration de son capital. D’une part, elle a absorbé une société immobilière, dite Société Immobilière de la rue Falguière n°15 (à Paris), dont l’apport consiste en des immeubles en ruine situés à cette adresse (mais le terrain est bien placé pour une opération immobilière) et en un passif de 200.000 francs. De plus, par réévaluation de ses actifs et intégration de réserves, son capital est porté à 26.400.000 francs, divisé en 13.200 actions de 2000 francs . Ajoutant à son objet social ‘‘toutes opérations mobilières ou immobilières quelconques’’, la société prend le nom de ‘‘Compagnie anonyme des Sablières de la Seine’’, tout en conservant le sigle C.S.S. Par la suite, elle abandonnera l’adjectif ‘‘anonyme’’ à l’occasion d’une modification de statuts pour retrouver son nom d’origine.

  La démolition des bâtiments du 15, rue Falguière et la construction d’un garage à cet emplacement ne seront cependant réalisées qu’en 1950. Quarante ans plus tard, le 15, rue Falguière deviendra une adresse prestigieuse .

  En prévision d’une reprise du marché de la construction et afin d’assurer son développement, la C.S.S. achète des terrains au-delà de Montereau-fault-Yonne et sur la Petite Seine, tandis qu’elle procède à la ‘‘découverte’’ de la Fosse des Carabiniers à Vigneux. A l’approche des risques de guerre, elle développe une activité un peu particulière : la fourniture à la Ville de Paris de millions de sacs de sable pour la défense passive et la protection des monuments. Un atelier d’ensachage est mis en place et cette activité présentera un certain intérêt au plan financier, la C.S.S. assurant à elle seule 85 % des besoins de la Ville de Paris.

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